En Belgique, les services prestés par les médecins dans l’exercice de leur activité habituelle sont exemptés de TVA.
Cependant, depuis le 1er janvier 2016, les interventions et traitements à vocation esthétique effectués par les médecins ne bénéficient plus de l’exemption de la TVA. Ceci implique de nouvelles obligations à respecter pour les médecins indépendants qui pratiquent ce type d’intervention et de traitement. Ces obligations relatives à la TVA viennent s'ajouter aux obligations auxquelles les médecins sont déjà soumis à titre d'indépendant.
Cet article fait le point sur les interventions
et traitements esthétiques désormais soumis à la TVA et sur les conséquences
concrètes qui en découlent pour les médecins et chirurgiens indépendants
pratiquant ces opérations.
I. Quels sont les interventions et traitements visés ?
A. Les interventions et traitements à vocation « purement » esthétique
Les interventions et traitements à vocation
esthétique qui sont soumis à la TVA sont ceux qui ont une vocation « purement »
esthétique. Il s’agit des interventions et traitements qui
n’ont aucun but thérapeutique ou reconstructeur. Il est important de
noter que le bénéfice psychologique du patient n’est pas pris en compte pour
apprécier la présence d’un but thérapeutique.
En outre, ces prestations doivent être
effectués par des médecins.
De plus, pour être soumis à la TVA, ces
interventions et traitements à vocation « purement » esthétique ne
doivent pas :
(a) soit être repris dans la nomenclature
des prestations de santé en matière d'assurance obligatoire contre la maladie
et l'invalidité ;
(b) soit, si ces traitements et
interventions sont bien repris dans cette nomenclature, répondre aux conditions
pour donner
droit à un remboursement conformément à la réglementation relative à
l'assurance obligatoire soins de santé et indemnités.
Par conséquent, seules les interventions et
traitements à vocation « purement » esthétique non remboursés ou
non repris dans la nomenclature sont soumis à la TVA.
Lorsque l’exemption s’applique, elle est
automatique sauf dans la situation où la prestation esthétique ne donne pas
lieu à un remboursement. Dans ce cas, le médecin doit motiver pourquoi il
applique l’exemption (par exemple, présence d’un traitement thérapeutique ou
reconstructeur à la suite d’une maladie qui ne donne pas lieu à remboursement
ou traitement esthétique simultané au traitement d’une affection fonctionnelle
non remboursée).
Mes interventions /
traitements à vocation esthétique sont-ils soumis à la TVA ?
B. Les prestations connexes aux interventions et traitements esthétiques visés
Lorsqu’une intervention ou un traitement
à vocation esthétique est soumis à la TVA, la soumission à la
TVA s’étend
également aux prestations accomplies par un médecin pendant ou après
l’intervention et qui sont effectuées en vue de préparer l’intervention
ou le traitement esthétique (par exemple, les prestations en matière de
cardiologie, pneumologie, neurologie, d’imagerie médicale, d’anesthésie, de
surveillance médicale…). Cependant, pour être soumises à la TVA, ces
prestations connexes doivent être indispensables pour la réalisation
de l’intervention ou du traitement esthétique ou pour la surveillance médicale qui en découle et ne pas entrer en considération pour l’intervention/remboursement,
conformément à la réglementation relative à l’assurance obligatoire soins de
santé et indemnités. Dans le cas contraire, ces prestations connexes sont
exemptées de la TVA.
Il est important de préciser que lorsque des
soins liés à un traitement esthétique sont prodigués par des prestataires de
soins qui ne sont pas des médecins (par exemple, un infirmier), ces soins sont
exemptés de la TVA. En effet, la possibilité d’imposition des prestations ne
s’applique qu’aux prestations des médecins.
En ce qui concerne le diagnostic (consultation préliminaire) et les examens
préalables (par exemple, analyses de sang, biologie clinique, imagerie médicale etc.) effectués avant
l’intervention, ils restent soumis à l’exemption. Néanmoins,
s’ils coïncident avec le traitement ou l’intervention esthétique soumise à TVA,
ils sont également soumis à la TVA.
Les prestations
connexes sont-elles soumises à la TVA ?
II. Qu’est-ce que cela signifie concrètement ?
Les médecins et chirurgiens indépendants prestant des opérations soumises à la TVA doivent respecter une série d’obligations au regard de la TVA.
En effet, le fait de prester des services soumis à la TVA (non exemptés) leur donne la qualité d’assujetti ordinaire à la TVA.
Obligations
de l’assujetti prestant des activités non exemptées
A. Identification à la TVA
Les assujettis prestant des activités taxées à la TVA doivent être identifiés à la TVA.
Par conséquent, les médecins et chirurgiens prestant des interventions et traitements esthétiques soumis à la TVA devront s’identifier à la TVA avant le commencement de cette activité (via le formulaire 604A).
Par le biais de
cette identification, vous vous verrez attribuer un numéro d’identification à
la TVA qui doit être communiqué aux fournisseurs et aux clients et mentionné
sur tous les contrats, factures, bons de commande, notes d’envoi et autres
documents relatifs à l’activité économique.
B. Application de la TVA aux interventions et traitements esthétiques complets
Le taux de TVA
applicable aux interventions et traitements esthétiques taxés est de 21%.
Lorsque
l’intervention ou traitement esthétique est soumis à la TVA, l’entièreté des
opérations prestées et facturées par l’hôpital ou la clinique où se déroule
l’intervention ou le traitement est soumise à la TVA à partir du début du
séjour du patient (exemple : la location de la chambre, la nourriture, les
médicaments etc.).
Si une intervention exemptée de TVA est
combinée avec une intervention ou un traitement esthétique soumis à la TVA
durant le séjour du patient, les frais directement imputables à l’opération
imposée sont également soumis à la TVA (sauf s’ils entrent en considération
pour l’intervention/remboursement), tandis que les autres frais (y compris les
frais communs aux deux opérations) sont exemptés.
C. Déclarations mensuelles/trimestrielles à la TVA
Les assujettis ordinaires à la TVA doivent également remplir des
déclarations périodiques à la TVA. Ces déclarations sont mensuelles ou
trimestrielles selon que le chiffre d’affaires annuel du médecin dépasse ou ne
dépasse pas le seuil de 2.500.000 EUR (comprenant toutes les opérations,
imposées ou exemptées).
Une dispense de déclaration périodique peut être obtenue sous
certaines conditions :
- si, hormis son activité au sein de
l'hôpital ou de la clinique privée, un médecin ne réalise aucune opération
imposée à la TVA (par ex., il n'a pas de cabinet privé où sont effectués des traitements à vocation esthétique) ; et
- si la clinique ou l’hôpital où se
déroule l’intervention esthétique déclare la TVA, la perçoit et la verse au
Trésor.
Cependant, si vous désirez bénéficier de cette dispense, vous devez
renoncer à votre droit à déduction de la TVA (voyez ci-dessous).
D. Droit à déduction
Les interventions et traitements à vocation
purement esthétique sont donc dorénavant soumis à la TVA. Cela signifie que les
médecins et chirurgiens pratiquant ces interventions et traitements peuvent
déduire la TVA grevant les frais exposés pour ces opérations (et seulement pour
ces opérations).
En effet, les médecins peuvent déduire la TVA
dans la mesure où elle grève des frais liés aux prestations esthétiques taxées,
tandis que la TVA concernant les frais liés aux prestations exemptées n’est pas
déductible. Si vous effectuez ces deux types de prestations (taxées et
exemptées), vous devez opérer la déduction de la TVA soit sur base d'un prorata
général, soit par la méthode de l'affectation réelle.
En outre, comme mentionné ci-dessus, pour
pouvoir bénéficier de votre droit à déduction, vous ne devez pas avoir opté
pour la dispense de déclaration périodique.
E. Facturation de la TVA, perception et versement au Trésor
Un assujetti doit émettre une facture pour les prestations soumises
à la TVA qu’il preste pour des assujettis ou des personnes morales non
assujetties.
Pour pouvoir être qualifié d’assujetti, il faut agir dans l’exercice
de son activité économique. Or, seules les personnes physiques
peuvent recourir à des interventions et traitements esthétiques, et ces
personnes ne recourent généralement pas à ces opérations pour leur activité
économique. Dès lors, les médecins ne
doivent en principe pas émettre de
factures.
Cependant, le médecin devra tout de même émettre une facture dans le
cas exceptionnel où la personne physique (le patient) exerce, en son nom propre
et pour son propre compte, une activité professionnelle pour laquelle elle a la
qualité d'assujetti à la TVA et où l'intervention ou le traitement esthétique
a, dans une quelconque mesure, un lien avec l'exercice de cette activité (par
exemple, un modèle).
Toutefois, l’obligation d’émission de la facture, de perception de
la TVA et de son versement au Trésor ne
s’applique toutefois pas si le
médecin a opté pour la dispense de
déclaration périodique.
Un régime de « mode particulier de paiement » est
mis à disposition des médecins pour les prestations esthétiques qu’ils
effectuent dans un hôpital ou une clinique privée (peu importe s’ils disposent
d’un cabinet privé dans lequel ils effectuent des prestations esthétiques).
S’il opte pour ce régime, l’hôpital ou la clinique se chargera d’émettre la
facture, de percevoir et de verser la TVA au Trésor. Le médecin ne devra pas
émettre de facture, tout en conservant son droit à déduction.
F. Liste annuelle des clients assujettis
Les assujettis identifiés à la TVA doivent
soumettre une liste de leurs clients assujettis à la TVA pour lesquels ils ont
prestés des services pour lesquels des factures devaient être émises. Cette
liste doit être transmise à l’administration tous les ans, avant le 31 mars.
Les clients particuliers ainsi que les assujettis exemptés sans droit à
déduction ne doivent pas figurer sur cette liste.
Une liste est dite « néante » lorsque
tous vos clients (i) disposent d’un numéro de TVA belge, mais le chiffre
d’affaires annuel par client relatif à ces clients ne dépasse pas 250 euros ou
(ii) ne disposent pas (à juste titre) de numéro de TVA belge. Ce sera très
souvent le cas pour les médecins puisque leurs patients agissent généralement
en tant que particuliers.
En cas de liste néante, vous pouvez soit :
a) déposer un listing « néant » en complétant la case Total - "Chiffre d'affaires" et Total – "Montant de la TVA" par le montant 0,00 ; soit
b) cocher la case prévue au cadre VIII dans la dernière déclaration périodique à la TVA de l’année civile.
G. Déclaration de modification ou de cessation d’activités
En cas de modification à l’activité économique
(telles que : dénomination, adresse, nature de l’activité…), un assujetti doit
faire une déclaration auprès du bureau compétent (formulaire 604B) dans un délai d’un mois à dater du moment où la modification est
intervenue.
De même, lorsqu’un assujetti cesse toute
activité économique lui conférant la qualité d’assujetti, il doit faire une
déclaration au moyen du formulaire 604C auprès du bureau compétent dans un délai d’un mois à dater de la cessation
d’activité.
H. Régime de la franchise pour les médecins avec un chiffre d’affaires annuel ne dépassant pas 25.000 EUR
Comme constaté ci-dessus, la soumission à la
TVA de certain(e)s interventions et traitements esthétiques implique le respect
de lourdes obligations administratives pour les médecins.
Dès lors, si le chiffre d’affaires annuel du
médecin concernant ces interventions et traitements esthétiques soumis à la TVA
ne dépasse pas 25.000 EUR hors TVA, le médecin peut opter pour le régime de la
franchise. Ce régime est optionnel et permet d’échapper à plusieurs obligations
TVA.
Ainsi, si le praticien opte pour ce régime, il ne
devra pas :
-
imputer
de TVA sur ses honoraires ;
-
émettre
de facture à ses patients ;
-
percevoir
et verser de TVA au Trésor ; ni
-
remplir
de déclarations périodiques à la TVA.
Cependant, il devra toujours notamment :
- être identifié à la TVA ;
- soumettre une liste annuelle des clients assujettis (sauf en cas de liste « néante »).
Cependant, s’il opte pour ce régime, le
praticien ne pourra pas déduire la TVA grevant les frais liés à ces interventions
et traitements esthétiques.